Oradour sur Glane 80 ans après
J’ai mis du temps avant de publier ce reportage car j’ai visité et photographié les ruines d’Oradour sur Glane en 2022. Un peu par manque de temps mais aussi parce les photographies d’un lieu de mémoire comme celui-là nécessite du recul. Il faut un temps de de maturation avant de sélectionner et travailler les photographies et ainsi rendre compte de ce que mes yeux de photographe ont saisi du lieu. L’occasion de la commémoration des 80 ans de ce drame m’est apparu comme un moment opportun pour publier ce reportage.
Le massacre
Je ne vais pas décrire ici le détail de ce qui s’est passé ce terrible samedi 10 juin 1944. Pour vous remémorer ces évènements, je vous invite à visiter le site Centre de la mémoire – Oradour sur Glane village martyr. La page Village Martyr > « récit du massacre » décrit le déroulement des évènements. Vous pouvez également consulter la page Wikipédia qui est très complète et bien documentée.
Si vous allez à Oradour je vous recommande de visiter le centre de la mémoire car il est très bien fait. Il présente les évènements en les replaçant dans leur contexte historique. Il y a également un mur de photographies « Visages d’Oradour » permettant de mettre un visage sur 532 des 643 victimes du massacre car ces personnes n’étaient pas des anonymes, ils avaient une vie, des familles, des amis, ce ne sont pas que des nombres.
Ils se croyaient des hommes, n’étaient plus que des nombres,
Depuis longtemps leurs dés avaient été jetés,
Dès que la main retombe il ne reste qu’une ombre,
Ils ne devaient jamais plus revoir un été.
Jean Ferrat – Nuit et Brouillard
Coté Photos
Les photographies à l’intérieur du village ont été faites avec un objectif 50 mm monté sur un boitier avec un capteur plein format. Ce type d’objectif apporte peu de déformation aux images et même si c’est techniquement inexact car la vision humaine est complexe et très différente de ce que peut restituer du matériel photographique, on peut admettre par approximation que ce type d’objectif permet de restituer la vision d’un œil humain. Cela a été un choix délibéré de ma part que d’essayer de témoigner de ce lieu avec cette vision « humaine ».
La météo n’était pas très favorable ce jour-là, le ciel était couvert, il y a eu un peu pluie et quelques éclaircies par moment. Avec une lumière assez pauvre les photos manquent un peu de contraste. Lors du travail de post-production je me suis dit que le noir et blanc serait bien adapté à ces conditions de lumière et que cela permettrait de coller à la période de l’évènement qui date de 80 ans. Avec le recul, j’ai trouvé le résultat globalement décevant, beaucoup de photos ne sortaient pas renforcées par ce traitement. Au final j’ai décidé de publier ces photographies en couleur, sans traitement fort avec l’idée de seulement témoigner de que l’on peut voir aujourd’hui dans ce lieu de mémoire. Après réflexion cela m’est apparu comme un choix plus judicieux.
Conclusion
Si vous avez la possibilité d’aller à Oradour, arrêtez-vous et prenez le temps de visiter et de vous recueillir dans ce lieu de mémoire avec respect et gravité. Ce qui s’est passé ce jour-là dans ce village est une barbarie qui est le produit d’une idéologie de haine dont les ressorts sont toujours à l’œuvre aujourd’hui. Les massacres perpétrés sur des civils il n’y a pas si longtemps dans des villages d’Ukraine en sont la preuve.
Je ne sais pas combien de temps les ruines du village martyr d’Oradour sur Glane pourront être conservées car le temps est impitoyable. Il efface les traces et érode tout en édulcorant la puissance émotionnelle de ces ruines, mais tant qu’elles resteront debout elles seront les témoins effrayants de ce que des êtres humains dépourvus de toute humanité sont capables d’infliger à d’autres êtres humains.